On peut considérer que toute éducation a valeur de prévention. L'inverse est sans doute également vrai.... parfois. Encourager à la vigilance, prévenir d'un danger, prévenir par exemple des conséquences d'une surexposition aux contenus les plus problématiques de la télévision ou du web peut être considéré comme une démarche éducative, mais à condition qu'elle ne se réduise pas à une injection, mais fasse l'objet d'un échange, d'une réflexion, d'une médiation, d'une compréhension et encourage la formation d'une opinion personnelle, de pouvoir l'exprimer et de pouvoir se positionner.
Par exemple, pour la prévention à un usage résonné des écrans, nous adhérons aux techniques actives de participation et de positionnement comme le proposent les animatrices de l'ANPAA 41, ou les théâtres forum interactif de la troupe de théâtre Barroco de St Pierre des Corps ou de l'association Médiapte, plutôt que certaines conférences durant lesquelles les échanges d'opinions du public sont moins faciles (moins de temps accordé et prise de parole intimidante). ADEIFvidéo propose aussi à celles et ceux qui le souhaitent des soirées d'échanges sur les médias. Ces soirées réunissent en moyenne une quinzaine de personnes et permettent à chacune d'entre elles de témoigner et de réfléchir sur ses usages des médias (presse,TV, radio, ciné, web). Une démarche souvent amusante, éclairante, quelque peu introspective, favorisant des prises de conscience et permettant sans doute de relativiser certaines inquiétudes. Goldorak go !
L'éducation aux médias a besoin d'éclairages de spécialistes comme ceux, entre autres, de Serge Tisseron, Monique Dagnaud ou Elisabeth Baton-Hervé dont nous recommandons les productions, mais d'autres avancent des raisonnements beaucoup plus intuitifs, moins scientifiques. Malgré leurs apparences savantes, raisonnables, vertueuses et bienveillantes, leur crédibilité interroge. Aussi, selon nous, beaucoup de publications, communications et conférences ont une approche trop anxyogène de l'éducation aux médias et reposent à l'excès sur la prescription de règles dans leurs usages pour en limiter les dangers. Mais ces règles sont trop souvent difficilement applicables, que ce soit par les familles ou par les professionnels de l'éducation. En revanche, des pistes d'activités pédagogiques ayant fait leur preuve et réellement adaptées aux réalités éducatives ne sont pas suffisamment proposées et expliquées.
Ces messages préventifs assez faciles et intuitifs semblent trop souvent élaborés, diffusés ou relayés par des personnes aguerries aux techniques de communication, mais dont les motivations et les compétences pour des actions éducatives efficaces, directement auprès des enfants et des jeunes, s'avèrent beaucoup moins évidentes. Ont-elle déjà elles-mêmes objectivement fait le point quant à leurs propres usages et sur l'influence des médias dans leur vie ? La difficile exemplarité des parents et des adultes en général, pour nombreux d'entre eux quasi dépendants à la télé, aux séries, aux réseaux sociaux, pose tout de même la question de la cohérence et de la crédibilité.
L'éducation aux médias ne peut pas se contenter uniquement de messages préventifs et de règles, plus ou moins déconnectés des réalités socio-éducatives et donc souvent inopérants. Elle doit être une occasion de susciter et d'encourager des apprentissages favorisant la connaissance (sans bourrage de crâne), par exemple sur la recherche d'audience et de bénéfices financiers des médias de masse, mais aussi le renforcement du sens critique et la créativité, en particulier dans le cadre de l'éducation populaire. A défaut peut-être de vouloir ou de pouvoir les proposer eux même, il est de la responsabilité des professionnel(le)s de la prévention, comme celles et ceux en ayant occasionnellement la mission, d'encourager et de soutenir des activités éducatives de terrain, concrètes, créatives et techniques, au sein de la famille, de l'école et des accueils éducatifs.